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Avant-propos : Cet article a été rédigé après mon voyage en Inde pour l'observation de l'éclipse totale de Soleil du 24 octobre 1995. Il a été publié sur le site d'Astronomie en Touraine et Centre-Ouest (aujourd'hui fermé). Il est toujours diffusé sur l'excellent site de François Pineau, Cadrans solaires de Touraine et d'ailleurs.


Outre les très nombreuses curiosités qu'offre ce pays, le Rajasthan rassemble plusieurs observatoires anciens dont le plus connu est celui de Jaipur. Il est sans doute bon, ici, de rappeler pourquoi ces observatoires ont été construits.

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Ci-dessus, à gauche: Le Maharadjah Sawai Jai Singh II.  Ci-dessus, à droite : vue partielle de l'observatoire de Jaipur, cliché pris depuis le belvédère du grand cadran solaire.

Le 3 novembre 1688, naquît le Maharadjah Sawai Jai Singh II. Il monta sur le trône d'Amber dès 1699 et à 14 ans, brillait déjà dans sa carrière militaire. Plus tard, il se consacra entièrement à son amour des sciences et des arts. Ainsi, il abandonna Amber après avoir érigé sa ville palais : Jaipur (cette nouvelle cité devint à l'indépendance la capitale de l'état du Rajasthan).

En 1719, à Delhi, dans la salle d'audience publique du Fort Rouge, se tenait une séance mouvementée. L'empereur moghol Mohammad Shah et le Maradjah Sawai Jai Singh II étaient témoins d'un débat à la cour, la discussion était fort animée pour établir certains calculs astronomiques.

C'est que l'empereur devait partir pour une longue expédition et le jour favorable du départ devait être fixé. La controverse venait des positions de certaines planètes qui étaient censées influencer la vie sur terre. Aucun observatoire astronomique n'existait pour vérifier les calculs. Le débat finit de manière peu concluante mais a fait naître une idée dans la tête du Maharadjah d'Amber qui avait étudié et acquis de bonnes connaissances en astronomie et en mathématiques. Sawai Jai Sîngh II décida de construire des observatoires astronomiques.

Dès 1724, le premier observatoire fut achevé à Delhi, endroit où la controverse était née sur la position des planètes. Ainsi, l'Inde admira pour la première fois des instruments en maçonnerie et pierre massive. Le Maharadjah astronome a continué à réaliser des expériences, des observations pendant près de sept ans, à l'époque des constructions des observatoires. Par la suite, il réforma le calendrier impérial et établit la valeur de l'obliquité de l'écliptique à 23° 28'.

Sawai Jai Singh II devint immortel grâce au travail réalisé en érigeant des observatoires en pierre : Delhi, Mathura, Varanassi, Ujjain et Jaipur.

Avec de telles constructions, Sawai Jai Singh II facilita l'approche de l'astronomie et de l'astrologie. Ses observatoires servirent de laboratoires, on pouvait s'y essayer à différents calculs et vérifier par des observations pratiques. Autrefois, ces observatoires servaient à accueillir des séminaires académiques, conférences, discussions et, surtout, à préparer des éphémérides, calendriers et almanachs.

Jaipur a été le seul observatoire que notre groupe a visité. L'emploi du temps chargé ne nous a pas autorisés à admirer celui de Delhi.

L'observatoire de Jaipur nous a été présenté par un guide indien qui, nous sachant intéressés par l'astronomie, n'a pas hésité à nous consacrer le temps nécessaire : ce qui a fait notre plus grande joie.

Le site, situé à 430 mètres d'altitude, occupe une longitude de 75° 49' 9" est et une latitude de 26° 55' 27" nord. Cet observatoire est le plus grand et a été construit après que celui de Delhi a été expérimenté avec succès par le Maharadjah en 1724. La construction fut achevée en 1728, hormis les touches de finition qui demandèrent encore quelques années. L'observatoire est implanté tout près du Palais Royal, permettant au Maharadjah astronome d'effectuer ses observations quand il le voulait.

Bien que situé au coeur d'une ville turbulente, l'observatoire paraît baigné dans une atmosphère calme et tranquille. Le monument est dans un très bon état de conservation, il a aussi été restauré en 1901. Depuis l'indépendance, c'est un monument national. Connu sous le nom de Jantar Mantar (Jantar = instrument; Mantar = calcul) il est considéré comme l'observatoire en pierre le plus grand du monde.


Les instruments de Jaipur. (Cliquer sur les images pour les agrandir)


jaipur 2Le petit cadran solaire équatorial, en grès rouge et marbre blanc, se voit comme un triangle basé dans le plan du méridien local et deux quadrants de chaque côté qui ont une inclinaison dans le plan de l'équateur céleste. Les quadrants sont gradués dans l'échelle des heures.
 

L'instrument de l'étoile Polaire est situé à l'est près du cadran solaire équatorial. Construit en grès rouge, cet appareil indique le nord céleste et aide à localiser l'étoile polaire "Dhurva Tara".


jaipur 5jaipur 6Les cadrans solaires hémisphériques sont faits dans le plan de l'équateur céleste. La face nord fonctionne comme un cadran solaire entre l'équinoxe de printemps et celui d'automne. La face sud fonctionne entre l'équinoxe d'automne et celui de printemps.
Cliché le plus à gauche : le cadran solaire, face sud.
Cliché ci-contre : le cadran solaire, face nord.

Le cadran solaire horizontal ne peut être visible que si l'on monte au-dessus de l'instrument précédent. L'heure lue ici peut être vérifiée par les cadrans solaires hémisphériques. Précisons que ce cadran a l'avantage de fonctionner les jours d'équinoxe, contrairement aux cadrans solaires hémisphériques.


L'astrolabe ou Yantra Raj (qui signifie "le roi de tous les instruments") se traduit par une carte céleste soigneusement gravée.


jaipur 7Le gigantesque cadran solaire équatorialest identique, sur le principe, au premier cadran cité plus haut mais il est cinq fois plus grand. Ci-contre, vue générale du grand cadran solaire. On y remarque, au sommet, le belvédère.
La base de son triangle à angle droit mesure 44 mètres, l'hypoténuse, inclinée de 27°, s'élève à 27 mètres... Le triangle est flanqué de deux énormes quadrants de 15 m de rayon, gradués en heures, minutes et secondes. L'ombre du gnomon s'y déplace d'environ 4 mètres par heure, soit 6 cm par minute, elle-même divisée en trente fractions d'une incroyable précision de deux secondes ! Un détail auquel, peut-être, le concepteur n'avait pas pensé est celui qui est dû à la diffraction de l'ombre. En effet, l'ombre n'est pas limitée par une ligne nette mais par une bande large d'une dizaine de centimètres de pénombre. Ce qui, a priori, fait perdre toute précision dans la lecture de l'heure mais c'est sans compter sur l'imagination des astronomes indiens qui surent lire avec précision quand même, en utilisant une fine aiguille (fétu de paille ou autre objet) dont l'ombre, mêlée à la pénombre, permet de déterminer exactement l'heure (pour en savoir plus sur cette méthode, contacter l'auteur). Ce grand cadran solaire est certainement le plus précis et le plus grand du monde.

Le belvédère des prévisions météorologiques est situé tout en haut du cadran géant. Les astrologues et les pandits astronomes s'y rendaient au coucher du soleil pour connaître, à l'aide d'un drapeau de mousseline, la direction du vent et, par conséquent, le temps.

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Notre guide indique la position de la graduation correspondant à 1 heure solaire.
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Notre guide indique le déplacement (entre le pouce et l'index) correspondant à 1 minute de temps. Noter également le manque de netteté du bord de l'ombre.

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Les instruments du zodiaque sont formés par douze cadrans aux orientations et inclinaisons différentes des styles. Les gnomons indiquent en réalité le pôle de l'écliptique au moment de l'observation.

Ci-contre : vue d'ensemble des instruments du zodiaque avec, en arrière plan, le grand cadran solaire. Noter les différentes inclinaisons des styles, ceux-ci étant en fonction de la direction du pôle nord éliptique variable au cours de l'année.

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Ci-contre, on voit bien les différentes directions des styles des cadrans de l'écliptique.

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L'instrument de sphère armillaire
est situé entre le cadran solaire sud et les instruments du zodiaque. Les hémisphères concaves ont un diamètre d'environ 5,50 m. Les plaques de marbre blanc constituent chacune une heure d'observation. L'écartement entre deux plaques est compensé par une plaque de l'autre sphère, ainsi, les deux sphères fonctionnent-elles alternativement.

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Les instruments de boule hémisphérique se composent de deux hémisphères creuses graduées.

Les instruments d'altitude/azimut sont construits en maçonnerie et en pierre. Il se ressemblent mais sont faits pour fonctionner en alternance. Formés de douze colonnes et d'un nombre identique de plaques horizontales, ces instruments représentent la sphère céleste. La lecture de l'ombre sur une colonne ou une plaque horizontale permet de connaître la hauteur et l'azimut du Soleil.

D'autres instruments, non moins intéressants, figurent en ce site astronomique. C'est le cas de l'instrument de l'écliptique, les instruments circulaires, l'instrument du mur méridien, etc.

Si vous allez en Inde, ne manquez pas Jaipur!

 

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